Au cours de leur 4e résidence, les étudiants de la Neuvième École ont passé cinq jours au Monfort théâtre à Paris, afin de matérialiser leur vision du pavillon qu'ils construiront pour la Quadriennale de Prague en juin 2023. Sarah Barzic, étudiante de l'École du Théâtre national de Strasbourg, nous écrit pour rendre compte des expérimentations qu'ils ont menées lors de cette semaine de travail.

Chères toutes, chers tous,
Voici le compte rendu de la semaine passée au théâtre du Monfort dans le 15e arrondissement de Paris. Cette semaine s’est étalée du 13 au 17 février, elle avait pour but de fixer le cahier des charges du pavillon école, mais encore de formaliser spatialement les pistes que l’on avait déjà pu évoquer auparavant. Ainsi il a été question de l’implantation du pavillon au sein de la quadriennale qui se déroulera sur la Pražská tržnice (place du marché), mais aussi des matériaux employés et plus généralement de l’histoire et du message que nous voulons transmettre à travers ces 25m² qui nous seront alloués.
La rédaction d’une note d’intention s’est faite en parallèle des expérimentations de manipulation et de prototypage de gestuelles que nous voudrions convoquer pendant le festival. Nous avons pu formaliser sous forme de croquis, de maquettes et à échelle 1 le pavillon. Cela nous a permis de soulever des contraintes techniques de conception, d’implantation dans le lieu, de temps, mais aussi de transport et de fabrication. Nous avons appuyé la volonté de penser ce pavillon de manière la plus frugale possible et ainsi limiter les coûts ainsi qu’un transport trop conséquent.
Ces questions ont pu être alimentées grâce aux échanges avec Nina et Cyril mais aussi avec Céline Pelcé, la marraine du projet, et Bruno Combernoux, compagnon tailleur de pierre que nous avions rencontré aux ateliers Verrecchia. Nous partirons donc du matériau pierre que nous développerons lors de nos prochaines rencontres aux dits ateliers à Versailles.
Grâce aux expérimentations faites lors des précédentes rencontres, nous avons observé que la pierre calcaire que nous travaillons avait une capacité d’absorption de l’eau importante qu’elle rejetait par la suite en un phénomène que nous avons nous-même baptisé « transpiration ». En effet la pierre perle et goutte. Ces observations sont venues nourrir notre imaginaire et ont permis de développer notre histoire spatiale.

Je vous laisse ici nos premières intentions :
« Nous avons la volonté de penser ce pavillon de 5x5 en tant que point de rendez-vous. Un espace d’accueil et de contact, où de possibles dialogues émergent. Ainsi, l'implantation du pavillon au sein du site de l’exposition est essentielle pour nous. Dans une volonté de réaffirmation du symbole de l’archétype fontaine, cette dernière est à la fois un repère urbain par son implantation centrale et un lieu refuge propices aux liens sociaux, à la rencontre et à la collectivité. Ouvert de tous côtés, notre pavillon est un espace en libre circulation où les déambulations des visiteurs sont ponctuées de rencontre-découverte de diverses matières poreuses et transpirantes en suspension. Cartographie sensible de possible parcours d’une eau dérivée, il est un espace sensoriel qui fait appel au toucher et à la mémoire des mains. Un espace significatif et symbolisant de notre propre histoire, de notre propre rencontre grâce à ce projet.
L'installation, pensée dans une verticalité, réunit et entrelace plusieurs matériaux considérés comme des “objets- filtres”, reliés entre eux par un enchevêtrement / labyrinthe de fil. Une structure où l’eau est invisible mais pourtant présente partout grâce à un système fermé de circulation par capillarité. Ces filtres de pierres et de tissu laissent place à une réflexion sur les strates par leur épaisseur, leur porosité et leur suspension. Leur intention est d’engendrer un échange de matières, voire un apport à l’eau telle qu’une colorisation, un parfum, un minéral. Ils invitent le visiteur à de multiples expérimentations où l’eau altérée est renvoyée à son caractère d’agent transmetteur. Ces interactions activeront la fontaine et développeront un vocabulaire autour de l’eau afin de pouvoir l’appréhender de façon empirique. Plier, Tenir, Essorer, Tirer, Soulever et plus encore.
À travers ces gestes manuels et collectifs, il sera proposé aux visiteurs, à des moments clefs de la journée, de participer à une performance qui s’étend au-delà des limites du pavillon. Une sorte de procession narrative vers le fleuve Vltava, développant le lien intime qui nous relie à l’eau et aux histoires qu’elle charrie. Nous avons à cœur de concevoir cette scénographie dans une optique frugale de la matière, à partir d'éléments préexistants et biosourcés : la pierre qui provient de déchets de carrière et l’eau du fleuve de la Vltava qui coule juste à côté du site. »