En coulisse et sur scène, La Cordonnerie est un duo de créateurs qui œuvrent à tous les étages. Et c’est aussi beaucoup de contraintes techniques liées au film et à la production de bruitages sur scène qu’ils relèvent avec l’aide de toute une équipe.

(2020) © Samuel Hercule, Pierrick Corbaz
Les regarder faire sur scène est un spectacle en soi. La Cordonnerie excelle dans l’art du décalage, avec des associations sonores improbables : verser des coquillettes dans un parapluie à l’envers et faire surgir le bruit du ressac, actionner un soufflet pour figurer le halètement d’un chien, prendre le bruit d’un four à micro-ondes pour le signal d’arrivée d’un ascenseur…
Le duo passe des jours à chiner aux puces ou sur Leboncoin leurs objets et accessoires de bruitage, choisis pour leur qualité sonore mais aussi plastique. Ils possèdent tout un bric-à-brac dans un hangar près de Lyon.
Peut-être faudrait-il trouver autre chose que ciné-spectacle pour nommer ce qu’invente la Cordonnerie tant le cinéma et le théâtre y dialoguent à la perfection ? « On n’est pas trop de deux pour arriver à penser à tout », affirme Métilde Weyergans. Car, contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, le duo ne crée pas en deux temps, d’abord un film muet puis un spectacle sonore, mais tout en même temps. « Dans la conception, tout arrive en parallèle, ça mobilise énormément. Quand tu travailles avec l’image, tu dois vraiment penser au son, à ce que cela va produire à la scène, l’image qu’on écrit et la vie au plateau doivent coexister, il faut vraiment les penser ensemble ». Chaque projet implique 18 mois à 2 ans de travail.
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Auteurs et cinéastes, mais aussi acteurs et metteurs en scène, Métilde Weyergans et Samuel Hercule se démultiplient, de la conception à l’interprétation en passant par les repérages, la réalisation, les bruitages et le montage... Ils sont tous les deux à toutes les étapes.
Ils écrivent à deux mais pas à quatre mains. Dans leur quatre-vingts mètres carrés des bords de l’Ourcq, ils s’installent chacun dans une pièce et écrivent des bouts qu’ils s’envoient par mail et discutent avant de laisser reposer pour ensuite réaliser un tricotage des deux. « C’est la fusion des deux qui fait l’écriture commune », précise Métilde Weyergans. « Avec le temps on accueille mieux les propositions et les critiques de l’autre », rétorque Samuel. « Depuis plusieurs projets, on a réussi à trouver une harmonie. On sait que quelque chose de mieux va sortir ». Ils ont gagné en confiance mutuelle : « parfois, explique Métilde, on dialogue beaucoup autour d’une séquence ou d’un personnage, mais, ensuite, on part dans des directions qui n’ont rien à voir et ce que chacun apporte ne correspond pas du tout à ce que l’autre avait imaginé ! Cette différence qu’on a, et le fait qu’on arrive à harmoniser ensuite, fait la qualité du travail. Il y a une grande exigence. À une époque, chacun voulait imposer son point de vue, maintenant il y a plus de souplesse ».
