Jusqu’ici secrétaire générale, Audrey Ardiet accède à la direction de la scène nationale avec notamment la volonté d’élargir la programmation à de nouveaux champs artistiques.
Fragilisée par le départ de Marie Didier intervenu en septembre 2021, de surcroît quelques mois seulement après la fermeture du bâtiment pour des travaux de rénovation, La Rose des Vents avait pris la sage décision de ne pas engager immédiatement une procédure de recrutement. Durant un peu plus d’un an, c’est donc une direction collégiale, accompagnée par Hélène Cancel, qui assuma la délicate mission de renouer le dialogue avec la Ville de Villeneuve-d’Ascq et de coordonner la première saison hors les murs. Aux côtés du directeur technique et de l’administrateur, y figurait Audrey Ardiet, secrétaire générale depuis 2016 et aujourd’hui nommée à la tête de la scène nationale. Si ce choix apparaît logique au regard de sa parfaite connaissance du fonctionnement de la structure et du territoire, l’intéressée confie avoir longuement réfléchi avant de postuler. « L’année de transition m’a permis de faire le point, de cerner mes envies, d’éprouver les actions que je mettais en œuvre auprès de l’équipe et du public, et finalement de me lancer », explique-t-elle.
Parce que la continuité n’exclut pas la nouveauté, Audrey Ardiet porte un projet qui entend accentuer la dimension pluridisciplinaire de la scène nationale – surtout centrée sur le théâtre et la danse – en l’élargissant au théâtre d’objets, au cirque (grâce à un partenariat d’ores et déjà noué avec Le Prato de Lille), à la magie nouvelle ainsi qu’au théâtre documentaire afin d’affermir les liens entre La Rose des Vents et le cinéma Le Méliès qu’elle abrite. Quatre artistes la seconderont dans sa démarche : Thierry Collet, dans le domaine de la magie nouvelle, Cyril Teste en matière de sensibilisation à l’image notamment via la mise en place d’ateliers de découverte de ses métiers, Nathalie Béasse dont les productions mêlent théâtre et danse et qui sera conviée à élaborer une forme in situ associant une fanfare locale et la population, et enfin Jeanne Lazar. Cette jeune metteuse en scène établie dans les Hauts-de-France, qui travaille sur la question de l’oralité et a conçu des spectacles radiophoniques, présentera l’an prochain une création autour des figures de la chanson française et francophone. Outre produire leurs nouveaux projets, la directrice de La Rose des Vents souhaite faire découvrir au fil des ans leur répertoire, s’appuyer aussi sur les formats différents qu’affectionne, par exemple, Thierry Collet, pour alterner des propositions dans des lieux non dédiés (maisons de quartiers, centres sociaux…) et sur de grands plateaux. Le désir d’ouverture à d’autres disciplines se manifestera, par ailleurs, dans l’accompagnement de compagnies régionales et/ou émergentes. Audrey Ardiet soutiendra ainsi en production et en diffusion des artistes issus d’univers très variés. Elle programmera, entre autres, Noémie Rosenblatt avec L’Ordre des choses, adapté d’un roman d’Émile Zola, le violoniste et comédien Tony Melvil pour un concert jeune public, l’autrice, metteuse en scène et performeuse Rebecca Chaillon et la créatrice lilloise de théâtre d’objets, Caroline Guyot.
L’action sur le territoire se verra facilitée par la longue aventure (jusqu’à la fin de la saison prochaine) hors les murs, qui conduit La Rose des Vents à investir de nombreux équipements (Centre dramatique national, Pôle cirque, comme théâtres municipaux et salles des fêtes) de la métropole lilloise et accroît ainsi son rayonnement, mais aussi à nouer des relations de proximité avec le tissu associatif local. « Cette période de nomadisme constitue également une formidable opportunité d’augmenter et de diversifier les publics ; une nécessité, dans la perspective de la réouverture de l’équipement qui disposera de deux salles aux jauges plus importantes qu’auparavant et dont l’activité sera donc très dense », souligne Audrey Ardiet. Les festivals étant particulièrement fédérateurs, la scène nationale maintiendra son événement emblématique transfrontalier, Next, et créera deux temps forts. L’un sera consacré à la magie nouvelle, et le second placé sous l’égide d’un « Été culturel » articulé dès juillet 2023 autour de spectacles de rue, d’ateliers et de concerts, en collaboration avec les structures villeneuvoises. Attachée à la dynamique partenariale, Audrey Ardiet poursuivra en outre les co-réalisations initiées actuellement avec plusieurs établissements identifiés sur une discipline spécifique : le Théâtre du Nord-Centre dramatique national pour le théâtre, Le Prato en cirque et Le Grand bleu pour le jeune public.
Enfin, la nouvelle directrice ambitionne de faire de La Rose des Vents un lieu ouvert sur la ville, facilitant ainsi son appropriation par les habitants, qui pourront le fréquenter en journée, comme par les professionnels. « J’envisage de transformer le hall en un espace de co-working où des administrateurs et des chargés de production, souvent très isolés, se rencontreront et échangeront sur leurs pratiques », précise Audrey Ardiet, qui compte mettre à profit les mois qui la séparent du retour dans les murs (prévu à l’été 2024) pour laisser libre cours à l’imagination et aux expérimentations.