À 39 ans, l’ancienne directrice du !POC! d’Alfortville prend les rênes de l’une des plus importantes scènes nationales en termes de fréquentation.
Découvrant Le Quartz via le festival Dañsfabrik alors qu’elle était conseillère à l’Office national de diffusion artistique (ONDA), Maïté Rivière avait éprouvé un véritable coup de cœur pour sa programmation mais aussi « la qualité de l’accueil manifestée par l’équipe, à l’égard des publics comme des artistes et des professionnels ». Aussi, quand après cinq années passées à Alfortville l’envie de diriger une scène labellisée s’imposa à elle, son regard se tourna vers ce lieu emblématique de la métropole brestoise, ville dont elle apprécie en outre la vitalité et les mutations qui s’y opèrent aujourd’hui. C’est d’ailleurs un Quartz en complète rénovation, appelé à vivre deux saisons hors de ses murs, que la nouvelle directrice s’apprête à investir. Loin de l’effrayer, cette perspective l’enthousiasme. « Je la considère comme une chance, un très bon laboratoire où réinterroger notre façon de travailler, nos souhaits et nos espoirs en vue de la réouverture », confie Maïté Rivière, désireuse de mettre cette période à profit pour observer, dialoguer avec l’équipe et dessiner les premiers contours de son projet artistique, résumé en ces termes : « libérer les énergies, faire communauté, inventer le théâtre de demain ».
Maintenir et développer des liens forts avec le territoire constitue un premier enjeu, facilité par les nombreux partenariats déjà engagés, et qu’il s’agira d’accentuer, avec les équipements culturels de la métropole – la Maison du Théâtre, le Théâtre Mac Orlan, la salle de musiques actuelles La Carène, le Centre d’art contemporain Passerelle, le Centre national des arts de la rue et de l’espace public (CNAREP) Le Fourneau – mais aussi l’important réseau des Maisons de quartiers. « Nous pourrons, par exemple, organiser des résidences in situ dans certains quartiers, des actions procédant de l’infusion sur une longue durée », précise Maïté Rivière.
Sur le plan de la programmation, tout en défendant une pluridisciplinarité, la directrice s’inscrira dans le sillage de ses prédécesseurs, Jacques Blanc et Matthieu Banvillet, en accordant une attention particulière à danse, avec la volonté de présenter (comme le plateau principal du Quartz le lui permet) de grandes pièces chorégraphiques et de faire du festival Dañsfabrik un temps fort de la création européenne et mondiale. Formée à bonne école auprès du directeur du Festival d’Automne, Alain Crombecque, Maïté Rivière entend en effet favoriser la circulation des œuvres et recevoir des artistes du monde entier à Brest. Elle réfléchit ainsi à la possibilité de « mutualiser des accueils et partager le repérage des productions » avec l’actuelle directrice artistique du Festival d’Automne, Marie Collin. Rappelant par ailleurs qu’une scène nationale a vocation à soutenir des compagnies, notamment émergentes, elle a associera trois artistes à son projet : la danseuse et chorégraphe franco-camerounaise Betty Tchomanga récemment établie à Brest, le collectif théâtral rennais Bajour ainsi que la percussionniste et compositrice Lucie Antunes, qui s’oriente de plus en plus vers les musiques électroniques mais avec laquelle elle envisage aussi de travailler sur les musiques traditionnelles (très prégnantes en Bretagne et célébrées lors du festival NoBorder porté par le Quartz) comme contemporaines, en lien avec l’Ensemble Sillages. « Son nouveau directeur, Gonzalo Bustos, désire proposer des créations in situ, des balades sonores, auxquelles Le Quartz pourrait contribuer », explique Maïté Rivière. Enfin, elle a également choisi d’appeler à ses côtés le chorégraphe Jérôme Bel, associé en qualité d’« artiste transversal » sur les questions environnementales, autre dimension importante de son projet.
Si on ajoute à cela l’ambition de s’adresser à une large population (avec une place significative réservée aux jeunes, dans cette ville estudiantine), de permettre l’accessibilité et l’inclusion (en continuant de proposer certains spectacles en audiodescription ou en langue des signes) et de susciter le débat d’idées grâce à l’organisation de cycles de rencontres, c’est l’image d’un Quartz ouvert – sur le territoire et le monde – et fédérateur que Maïté Rivière souhaite affermir dans les années à venir.