La directive, qui a pour objet d’harmoniser le droit de l’Union européenne et d’adapter le droit d’auteur face au développement de la diffusion numérique d’œuvres protégées, est en partie transposée dans la loi française. Elle prévoit notamment de nouvelles obligations pour les plateformes de partage de contenus en ligne et une responsabilité renforcée ainsi que de nouvelles règles permettant une meilleure protection et une plus juste rémunération des auteurs et artistes interprètes. La mise en application effective de ces règles est subordonnée à l’entrée en vigueur d’ordonnances dans les mois prochains.
L’article 34 de la loi n°2020-1508 du 3 décembre 2020 acte de la future transposition de certaines dispositions de la directive 2019/790 du 17 avril 2019 dans le droit français, notamment les articles 17 à 23.
Une responsabilité renforcée pour les plateformes de partage de contenus en ligne
L'article 17 de la directive précise que le fait pour une plateforme de donner au public l’accès à des œuvres protégées par le droit d’auteur (alors même qu’elles ont été téléversées par ses utilisateurs) constitue un acte de communication au public, ce qui la rend responsable en cas de diffusion sans accord de l’auteur, et doit l'inciter à conclure un accord de licence avec les titulaires des droits. Cet accord couvrira alors également les actes accomplis par ses utilisateurs (s’ils sont à titre non commerciaux ou que leur activité ne génère pas de revenus significatifs).
En l’absence d’accord de licence, la responsabilité de la plateforme pourra être engagée sauf à ce qu’elle démontre :
- Avoir fait tout son possible pour obtenir une autorisation ;
- Avoir fait tout son possible pour garantir l’indisponibilité des œuvres pour lesquels les titulaires leur ont fourni des informations pertinentes et nécessaires ;
- Avoir agi promptement dès réception d’une notification suffisamment motivée de la part des titulaires des droits, pour bloquer l’accès aux œuvres ou pour les retirer de leurs sites ;
- Avoir fourni ses meilleurs efforts pour empêcher que les œuvres soient de nouveau téléversées dans le futur.
La directive impose enfin la mise en place, par les fournisseurs de services de partage de contenus en ligne, d’un dispositif de traitement des plaintes et de recours rapide et efficace, à la disposition des utilisateurs de leurs services en cas de litige portant sur le blocage de l'accès à des œuvres ou autres objets protégés qu'ils ont téléversés ou sur leur retrait. À l’inverse, lorsque des titulaires de droits demandent à ce que l'accès à leurs œuvres ou autres objets protégés spécifiques soit bloqué ou à ce que ces œuvres ou autres objets protégés soient retirés, ils doivent justifier leurs demandes.
La directive réaffirme également la pleine efficacité des exceptions aux droits d’auteur, à savoir que toute utilisation ou mise en ligne par un utilisateur à des fins de citation, critique, revue, caricature, parodie ou pastiche reste autorisée.
La loi du 3 décembre 2020 confie à la Haute Autorité, pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), le soin de veiller à la mise en œuvre effective des dispositions précitée.
L’ordonnance qui permettra l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles sera prise dans un délai de 6 mois à compter du 3 décembre 2020.
En outre, cette directive a également pour effet de créer un droit voisin des éditeurs de publications de presse (article 15), de permettre une nouvelle exception au droit d’auteur en autorisation l’exploration de données (data mining) à des fins de recherches, d’enseignement, d’éducation et de préservation du patrimoine culturel ou encore de proposer un système spécifique de négociation amiable (création d’un organisme impartial ou médiateurs) permettant aux parties de trouver un accord ayant pour objet la mise à disposition d’œuvres audiovisuelles sur des services de vidéo à la demande.
Une meilleure protection et une plus juste rémunération des auteurs et artistes interprètes
Dans les articles 18 à 23, la directive pose le principe selon lequel lorsqu’un auteur ou un artiste interprète cède ses droits exclusifs pour l’exploitation de son œuvre, il a droit à une rémunération appropriée et proportionnelle.
Elle impose également que les bénéficiaires de ces droits d’exploitations envoient au moins une fois par an des informations à l’auteur ou à l’artiste interprète, notamment en ce qui concerne les modes d'exploitation, l'ensemble des revenus générés et la rémunération due.
La directive a mis en place également un mécanisme d’adaptation des contrats permettant aux auteurs et aux artistes interprètes de réclamer à la partie avec laquelle ils ont conclu un contrat d'exploitation des droits ou aux ayants droits de cette partie, une rémunération supplémentaire appropriée et juste lorsque la rémunération initialement convenue se révèle exagérément faible par rapport à l'ensemble des revenus ultérieurement tirés de l'exploitation des œuvres ou des interprétations ou exécutions. Ce mécanisme ne s’applique pas si le partenaire est un organisme de gestion collective (SACD, SACEM, SPEDIDAM, ADAMI etc…).
Des procédures alternatives de règlement des litiges doivent être mises en place et les organisations représentant les auteurs et les artistes interprètes doivent pouvoir engager ces procédures à la demande spécifique d'un ou plusieurs auteurs et artistes interprètes.
La directive institue enfin un droit de révocation au bénéfice de l’auteur ou de l’artiste interprète, lui permettant de révoquer en tout ou partie le transfert de droit effectué au bénéfice d’un tiers en cas de non exploitation de l’œuvre par ce dernier.
Toute disposition contractuelle contradictoire avec les règles énoncées ci-dessus sont inopposables aux auteurs et artistes interprètes.