En contrepartie de la cession de ses droits patrimoniaux, l'auteur perçoit le plus souvent une rémunération.
Cette rémunération est fixée et précisée dans le contrat de cession des droits d'exploitation. Le cessionnaire des droits est alors en charge de verser la rémunération de l'auteur, selon la périodicité définie au contrat.
L'auteur peut aussi, selon le genre de sa création et les exploitations réalisées, percevoir d'autres rémunérations, telles que la rémunération pour copie privée, la rémunération au titre des droits de reproduction mécanique. Ces rémunérations font l'objet d'une gestion collective, elles ne seront donc pas abordées dans cette étude. Cette étude ne traitera que la rémunération fixée dans les contrats de cession de droits d'auteur.
Il convient de rappeler que, pour la création d'une pièce de théâtre, les auteurs peuvent évidemment être les auteurs du ou des textes littéraires (romans, pièce de théâtre, etc.), mais également le traducteur, le metteur en scène, éventuellement le costumier, le décorateur, le scénographe, dans la mesure où leur création est originale et formalisée (voir étude "Œuvre protégeable" ).
I.Cession de droits d'exploitation à titre gracieux ou onéreux
La cession de droits d'auteur à titre gracieux est une possibilité prévue par le Code de la propriété intellectuelle : "Le droit de représentation et le droit de reproduction sont cessibles à titre gratuit ou à titre onéreux" (art. L122-7 du Code de la propriété intellectuelle ).
Il a été ajouté : "l'auteur est libre de mettre ses œuvres gratuitement à la disposition du public, sous réserve des droits des éventuels coauteurs et de ceux des tiers ainsi que dans le respect des conventions qu'il a conclues" (art. L122-7-1 du Code de la propriété intellectuelle ).
La jurisprudence exige toutefois que cette cession à titre gracieux soit consentie de façon expresse : "l'auteur est libre, si, du moins, il a une claire conscience de ce qu'il cède à titre gratuit, de renoncer à percevoir des droits patrimoniaux sur l'exploitation de son oeuvre" (CA, Paris. 25 nov. 2005). Il demeure cependant essentiel de pouvoir justifier de l'existence d'une cause motivant la gratuité (CA, Paris. 11 sept. 2013). Il peut par conséquent être judicieux de justifier la gratuité de la cession dans le contrat de cession des droits.
Si la rémunération n'est pas mentionnée dans le contrat de cession des droits d'auteur, la cession est-elle est valable ?
La cession à titre gratuit est possible sous réserve qu’elle soit expressément consentie ; il ne doit exister aucune ambiguïté sur le caractère gratuit de la cession. Si tel n’est pas le cas et si aucune rémunération n’est définie alors la validité de la cession pourra être contestée.
Un auteur adhérent à la SACD peut-il céder ses droits gracieusement ?
L'auteur d'œuvres dramatiques et/ou littéraires adhérent à la SACD a l'obligation d'y déclarer toutes ses œuvres. Or, dès lors que la SACD gère les droits d'une œuvre, l'auteur ne peut plus, sauf exception, céder ses droits gracieusement, la SACD imposant des pourcentages de rémunération "plancher".
L’auteur qui a violé ses obligations statutaires en cédant ses droits gracieusement reçoit un courrier pour lui rappeler ses obligations. La SACD va alors aller percevoir les droits auprès du producteur qui se retournera éventuellement contre l’auteur. La SACD rappelle au producteur qu’il n’a pas le droit de faire signer ce genre de contrat à un auteur membre de la SACD.
Il existe toutefois quelques dérogations à la perception systématique. Elles sont prévues dans les conditions générales de la SACD à l'article 6 du document les recensant :
- les manifestations caritatives : c’est un motif de non perception par la SACD, si l'auteur ou tous les coauteurs l'acceptent expressément. Les associations qui en font la demande doivent être reconnues d’utilité publique et il faut que la demande arrive à la SACD plus d’un mois avant les représentations ;
- l'auteur-producteur : l’auteur-producteur est l’auteur qui est membre de la compagnie à un autre titre (directeur artistique, metteur en scène par exemple). Cette dérogation est encadrée. Elle doit être soumise par écrit à la Direction du Spectacle vivant plus d’un mois avant la représentation. Il faut que ce soient des représentations avec une économie fragile, par exemple lorsque la compagnie exploite directement l’œuvre en louant un théâtre par exemple (il ne faut pas qu’il y ait de cession du spectacle). Il faut que tous les auteurs, s’il y en a plusieurs, soient membres de la compagnie et il faut, bien sûr, que tout le monde accepte ;
- lorsque le travail de création est en cours et que l'auteur présente son travail, il peut demander à la SACD de ne pas percevoir. Cela peut être sortie de résidence ou au cours d’une résidence. Par exemple, l’auteur montre un morceau de son travail.
- pour les spectacles de fin d’année dans les écoles, les représentations données par les élèves et sans billetterie. Avec l’accord de l’auteur, la SACD peut ne pas percevoir. Il faut toujours, de toute façon, demander l’accord de l’auteur, sinon la SACD perçoit.
Existe t-il des cas d'exploitation d’œuvre dans lesquels l'auteur n'est pas rémunéré ?
Dans les cas d'exception aux droits d'auteur, aucune autorisation ne doit être sollicitée, aucun contrat de cession n'est conclu ; par conséquent, aucune rémunération ne doit être versée à l'auteur (voir étude "Exceptions aux droits d'auteur" ).
II.Modalités de rémunération des auteurs
a.Principe : rémunération proportionnelle
1.Rémunération proportionnelle de l'auteur
"La cession par l'auteur de ses droits sur son oeuvre peut être totale ou partielle. Elle doit comporter au profit de l'auteur la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l'exploitation" (art. L131-4 al.1 du Code de la propriété intellectuelle ).
La rémunération proportionnelle est un principe fondamental du droit d'auteur français. Il s'agit d'ailleurs d'une règle d'ordre public.
a.Cession totale ou partielle des droits d'auteur : pas d'incidence sur la rémunération proportionnelle
Que l'auteur cède l'intégralité de ses prérogatives de droits patrimoniaux ou qu'il ne cède que certains de ces droits n'a aucune incidence sur le principe de rémunération proportionnelle. La cession partielle étant visée par le législateur, la cession du seul droit de représentation (pour l'exploitation d'une œuvre dans une pièce de théâtre uniquement par exemple) ou la cession du droit d'adaptation ne remet pas en cause le principe de rémunération proportionnelle. Il a d'ailleurs été reconnu que les cessions du droit de traduction étaient également visées par le principe de la proportionnalité de la rémunération (CA Paris. 25 juin 2003. RIDA 1/2004, p.246).
b.Auteur salarié
Le fait qu'une création ait eu lieu lors de l'exécution d'un contrat de travail ne remet pas en cause la rémunération proportionnelle. En effet, le salaire perçu par un auteur salarié constitue la contrepartie de la prestation de travail effectuée par ce dernier ; cela n'empêche pas que cet auteur salarié doive céder ses droits d'auteur sur sa création et perçoive en contrepartie une rémunération proportionnelle (voir étude "Auteur salarié et auteur fonctionnaire" ).
Un metteur en scène, pour l'exécution matérielle de sa prestation, bénéficie d'un contrat de travail et, si sa mise en scène est originale et formalisée (ex : livret, enregistrement audiovisuel, etc.), il peut également bénéficier d'une rémunération en droits d'auteur lors de l'exploitation de son œuvre.
c.Pas d'application de la règle de proportionnalité aux cessionnaires des droits
L'article L131-4 alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle ( ) mentionne expressément "la cession par l'auteur de ses droits" et précise que cette cession doit comporter une rémunération proportionnelle "au profit de l'auteur". La doctrine en a déduit que la rémunération proportionnelle n'est obligatoire que pour les cessions consenties par l'auteur lui-même, et non pour les cessions consenties par les cessionnaires des droits de l'auteur.
Cette inférence a également été consacrée par la jurisprudence (notamment Cass, civ, 1er. 13 oct. 1993. Dalloz 1994, p.166). La Cour d'appel de Paris a d'ailleurs récemment confirmé cette solution en jugeant que "les exigences tenant à la rémunération proportionnelle des auteurs s'imposent au cessionnaire des droits d'auteur mais non aux sous-cessionnaires qui n'ont pas de relation directe avec les auteurs" (CA Paris, 4e ch., 16 janv. 2004. Propr. intell. janv. 2005, p. 64).
Si le cessionnaire cède ses droits à un sous-cessionnaire, le principe selon lequel le cessionnaire doit verser une rémunération proportionnelle à l'auteur subsiste (TGI, Paris. 2 juin 1988. RIDA, janv. 1989, p.194).
Il est à noter qu'il est ici seulement fait référence aux cessionnaires. Les ayants droit, dans le sens d'héritier, ne sont pas concernés. Ainsi, le principe de la rémunération proportionnelle s'applique à l'héritier d'un auteur mort il y a moins de 70 ans.
2.Pourcentage de rémunération
a.Principe : libre négociation du taux
La loi ne fixe aucun pourcentage minimum ou maximum, il s'agit donc d'une libre négociation entre les parties. Le taux peut être fixe ou variable (en fonction des conditions d'exploitation, du temps ou du nombre d'exemplaires vendus, etc.) Ce pourcentage n'empêche pas de prévoir en plus une somme forfaitaire fixe ou correspondant à des avances sur droits ou minimum garanti.
Il faut que ce taux ait un caractère sérieux. Si le pourcentage est dérisoire, le juge parle d’ambiguïté et de flou et donc de clause nulle et non avenue, c'est-à-dire que la contrepartie n’existe pas. A par exemple été considérée comme nulle la clause prévoyant une rémunération apparemment proportionnelle, mais avec un taux à 0% pour la première tranche d'exemplaires d'une œuvre vendus. La clause prévoyait, en l'espèce, que jusqu'à 1 000 exemplaires vendus, le taux de rémunération serait de 0% (CA Paris. 25 juin 2003. RIDA 1/2004, p.246).
b.Exception : auteur adhérent à une société de gestion collective ou auteur édité
Dans l'hypothèse d'une cession de droits sur une œuvre déclarée à une société de gestion collective, par exemple à la SACD ou à la SACEM, des pourcentages de rémunération minimum sont imposés.
Un auteur adhérent à la SACD peut demander une rémunération plus importante, mais jamais inférieure aux taux fixés par cette société de gestion collective. De même, un éditeur, tel que l'Arche, peut imposer des pourcentages plancher.
b. 1. Taux de perception de la SACD pour une œuvre principale
On entend par œuvre principale l’œuvre dramatique, l’œuvre lyrique, le ballet, l’œuvre chorégraphique, l’œuvre de cirque, d’arts de la rue, le spectacle de marionnettes, les mimes, les sons et lumières, les feux d’artifice et les spectacles composés, par exemple un spectacle de montage de textes.
Représentations données à Paris. Le taux minimum, sauf en cas de traité général de représentation est de 12% des recettes de billetterie (c'est-à-dire le prix payé par le public, y compris par abonnement) hors TVA ou de la recette assurée au producteur en contrepartie des représentations (prix de vente, forfait, garantie de recette) s’il n’y a pas de billetterie. Dans cette assiette la SACD inclut les frais d'approche (ils sont définis dans les conditions générales de la SACD comme les frais de voyage et d’hébergement du personnel artistique et technique et les frais de transport du matériel et des décors).
En plus des droits d'auteur, la SACD perçoit :
- une contribution à caractère social et administratif (CCSA) de 1% calculée sur la même assiette que les droits d'auteur ;
- la contribution diffuseur-Agessa dont le montant est égal à 1,10% des droits d'auteur (dont 1% au titre de la sécurité sociale et 0,10% au titre de la formation continue).
La CCSA et les droits d'auteur sont majorés d'une TVA à 10% (art.279 g du Code général des impôts ).
Représentations données en France en dehors de Paris. Le pourcentage "plancher" est de 10,50% appliqué sur l’assiette la plus intéressante pour l’auteur entre les recettes de billetterie (c'est-à-dire le prix payé par le public, y compris par abonnement) hors TVA et le prix de cession hors TVA.
En plus des droits d'auteur, la SACD perçoit :
- une contribution à caractère social et administratif (CCSA) de 2,10% calculée sur la même assiette que les droits d'auteur ;
- la contribution diffuseur-Agessa dont le montant est égal à 1,10% des droits d'auteur (dont 1% au titre de la sécurité sociale et 0,10% au titre de la formation continue).
La CCSA et les droits d'auteur sont majorés d'une TVA à 10 (art.279 g du Code général des impôts ).
Minimum garanti.
Mise à jour avril 2016
Depuis le 1er janvier 2016, sauf demande particulière de l'auteur ou des ses ayants droits, la SACD n'applique plus de minimum garanti lorsque l’œuvre est exploitée dans le cadre de représentations payantes (représentations donnant lieu à un prix de cession et/ou à des recettes de billetterie). Le minimum garanti reste automatique pour les représentations gratuites. Dans ce cas, l'auteur perçoit 10,5% ou 12% (selon le lieu de la représentation) calculé soit sur le budget des dépenses hors taxes liées au montage artistique, soit sur 30% de la jauge financière du lieu de représentation, soit un forfait dont il détermine lui-même le montant.la SACD perçoit en plus :
- une contribution à caractère social et administratif (CCSA) de 1/12ème du minimum garanti pour les représentations données à Paris et de 1/5ème du minimum garanti pour les représentations hors Paris ;
- la contribution diffuseur-Agessa dont le montant est égal à 1,10% des droits d'auteur (dont 1% au titre de la sécurité sociale et 0,10% au titre de la formation continue).
La CCSA et les droits d'auteur sont majorés d'une TVA à 10% (art.279 g du Code général des impôts ).
b.2. Taux de perception de la SACD pour une œuvre associée
Certaines œuvres associées à l'œuvre principale déclarée à la SACD, peuvent faire l'objet d'une perception supplémentaire (par exemple, une musique de scène originale, des chorégraphies, mimes, numéros de cirque ; ou une mise en scène peuvent être déclarés comme œuvres associées).
Auteur de musique de scène. La SACD limite son intervention à la perception des droits sur les musiques originales (c'est-à-dire les musiques spécialement créées pour un spectacle, qu'elles soient jouées en direct ou diffusées par le biais d'une bande son)
La déclaration de l'œuvre peut avoir une incidence sur la rémunération que doit verser l'utilisateur de la musique :
- si la musique de scène enregistrée est déclarée sur le bulletin œuvre de spectacle vivant, la quote-part reversée à l'auteur compositeur de la musique est librement décidée entre les parties.
- si la musique est déclarée sur le bulletin œuvre associée, soit une quote-part des droits est librement fixée entre les différents auteurs, soit des droits sont perçus en plus.
Dès lors que les droits sont perçus en plus des droits d'auteur de l'œuvre principale, le taux versé est de 0,10% des recettes de billetterie par minute, généralement plafonnée à 4%, sauf en cas de meilleur accord conclu avec le producteur, et avec une limite minimale de versement de 0,50% des recettes de billetterie.
De plus, dès lors qu'il s'agit de diffusion de musique en bande son (utilisation d'un support et non jeu en direct de la musique), il faut en plus verser :
- 0,15% de l'assiette de perception des droits de représentation en cas de musique dissociable (lorsque le spectacle peut être représenté sans ladite musique, c'est le cas lorsque la musique est déclarée en œuvre associée) ;
- 0,30% de l'assiette de perception des droits de représentation en cas de musique indissociable (lorsque le spectacle ne peut être représenté sans ladite musique, c'est le cas lorsque la musique est déclarée sur le bulletin de déclaration de l'œuvre de spectacle vivant).
Auteur de la mise en scène. Si la mise en scène est considérée comme originale (voir étude "Oeuvre protégeable" point II. B. 2 ) et si le metteur en scène est adhérent à la SACD, des droits d'auteurs lui sont reversés.
La mise en scène est toujours déclarée à la SACD sur le bulletin "œuvre associée de spectacle vivant". A la différence de la musique, les droits versés au metteur en scène font toujours l'objet d'une perception complémentaire et ne peuvent en aucun cas être déduits de la part des autres auteurs. Le taux est librement fixé en accord avec le producteur du spectacle.
3.Assiette de calcul de la rémunération proportionnelle de l'auteur
Recettes provenant de la vente ou de l'exploitation. Le législateur est resté flou sur l'assiette de calcul de la rémunération proportionnelle. L'assiette de calcul correspond "aux recettes provenant de la vente ou de l'exploitation" de l'œuvre (art. L131-4 al.1 du Code de la propriété intellectuelle ).
En vertu de ce principe et en l'absence de dispositions plus précises, la doctrine et la jurisprudence en ont déduit que l'assiette de rémunération correspondait au prix payé par le public pour accéder à l'œuvre : "Il résulte des dispositions impératives de l'article L131-4 du Code de la propriété intellectuelle ( ) que la participation de l'auteur aux recettes doit être calculée en fonction du prix de vente au public" (Cass, civ 1er. 9 oct. 1984. Dalloz 1985, info. Rap., p.316).
Cette solution est en conformité avec une volonté constante du législateur de protéger les auteurs.
Dans l'hypothèse d'un auteur non adhérent à la SACD ou non édité, l'auteur sera alors rémunéré sur les recettes de billetterie hors TVA, prix payé par le public, ou sur le prix de cession du spectacle, ou encore sur le minimum garanti versé dans le cadre d'un contrat de coréalisation (voir étude "Contrat de coréalisation" ), à priori selon la formule la plus favorable à l'auteur.
Frais d'exploitation. Toujours dans la logique de protection des auteurs, un arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris a précisé que le législateur souhaitait "protéger les auteurs et éviter qu'ils supportent les frais d'exploitation (en l'occurrence il s'agissait d'ouvrages)" (CA, Paris. 19 déc. 1991. Dalloz 1992. Info. Rap., p.87).
Dans cette logique, lorsque le taux de rémunération versé à l'auteur est basé sur le prix de cession ou sur un minimum garanti, il serait logique d'intégrer les frais d'approche (tels que les frais de transport et d'hébergement) dans l'assiette de calcul des droits, c'est-à-dire dans le prix de cession. Mais cette solution, pour le spectacle vivant, n'a pas été retenue en jurisprudence.
Taxes. Les taxes, dont la TVA, doivent toutefois être exclues de l'assiette de rémunération. Cette exclusion, à défaut d'avoir été précisée par le législateur, a été fixée par la Cour de cassation : la rémunération de l'auteur doit être calculée sur le prix hors taxe (Cass. 1re civ., 16 juill. 1998. 96-10123).
Œuvre déclarée à la SACD. L'assiette se compose :
- pour les représentations données à Paris : des recettes de billetterie (c'est-à-dire le prix payé par le public, y compris par abonnement) hors TVA ou de la recette assurée au producteur en contrepartie des représentations (prix de vente, forfait, garantie de recette) s’il n’y a pas de billetterie ;
- pour les représentations données en dehors de Paris : des recettes de billetterie (c'est-à-dire le prix payé par le public, y compris par abonnement) hors TVA et le prix de cession hors TVA, selon la formule la plus favorable à l'auteur.
Lorsque la SACD applique un pourcentage sur un prix de cession, elle pratique ce prix sur le prix de cession ainsi que sur les frais d'approche, aussi appelés "frais + +" (voir étude "Contrat de cession des droits d'exploitation d'un spectacle" et "Contrat de coréalisation" ).
Exploitation de l’œuvre sous une forme non prévue ou imprévisible. "La clause d'une cession qui tend à conférer le droit d'exploiter l’œuvre sous une forme non prévisible ou non prévue à la date du contrat doit être expresse et stipuler une participation corrélative aux profits d'exploitation" (art. L131-6 du Code de la propriété intellectuelle ). L'objectif poursuivi par cette disposition est évidemment d'anticiper l'évolution des techniques en permettant l'adaptation d'un contrat qui, bien souvent, est conclu pour une longue durée, voire pour toute la durée du monopole (soit 70 ans à compter du décès de l'auteur). Dans cette hypothèse, toute rémunération forfaitaire est exclue. Cette solution est logique car la fixation d'un forfait supposerait de pouvoir chiffrer, dès la conclusion du contrat, l'ampleur de l'exploitation du mode inconnu, ce qui est, par hypothèse, impossible.
4.Obligation de rendre des comptes
"En cas de cession partielle, l'ayant cause est substitué à l'auteur dans l'exercice des droits cédés, dans les conditions, les limites et pour la durée prévues au contrat, et à charge de rendre compte" (art. L131-7 du Code de la propriété intellectuelle ). Cet article, même s'il ne concerne que les cessions partielles, s'applique fréquemment en pratique ; les cessions totales étant assez rares.
b.Exception : la rémunération forfaitaire
Tous les exemples donnés sont issus de décisions de tribunaux. Il ne s'agit pas de solutions acquises. En effet, chaque situation doit être examinée au cas par cas afin de vérifier si la rémunération au forfait est licite ou non.
1.Cas de rémunération forfaitaire licites
Les cas dans lesquels la rémunération de l'auteur pourra être constituée d'une somme forfaitaire sont les suivants. Il s'agit d'une liste exhaustive fixée par l'article L131-4 al.2 du Code de la propriété intellectuelle ( ) (seuls les cas relevant du spectacle vivant sont abordés dans cette étude) :
- impossibilité, en pratique, de déterminer la base de calcul de la participation proportionnelle ;
- impossibilité de contrôler l'application de la rémunération proportionnelle ;
- caractère excessif des frais d'opérations de calcul et de contrôle ;
- impossibilité d'appliquer la règle de la rémunération proportionnelle en fonction de la nature ou des conditions de l'exploitation de l'œuvre ;
- conversion de la rémunération proportionnelle en forfait ;
- les autres cas prévus par le Code de la propriété intellectuelle.
a.Impossibilité, en pratique, de déterminer la base de calcul de la participation proportionnelle et de contrôler l'application de la rémunération proportionnelle
La première exception à la rémunération proportionnelle est l'hypothèse où "la base de calcul de la participation proportionnelle ne peut être pratiquement déterminée".
Par "base de calcul", il convient d'entendre l'assiette de calcul de la rémunération proportionnelle qui est constituée des recettes provenant de la vente ou de l'exploitation de l'œuvre.
Est notamment visée l'hypothèse de la communication de l'œuvre au public lorsqu'elle n'implique pas le paiement direct d'un prix. Dans la mesure où l'exploitation ne génère pas de recettes, il est, en effet, impossible de se conformer aux prescriptions de l'article L131-4, alinéa 1er du Code de la propriété intellectuelle ( ), et de calculer le montant des redevances de l'auteur à partir d'un prix qui n'existe pas. C'est notamment le cas lorsque l’œuvre est diffusée gratuitement (TGI Paris, 3e ch., 16 déc. 1980. RIDA juill. 1981, p. 223) ou à des fins publicitaires (Cass, civ. 20 mars 2001. Bull. civ. 2001, I, n° 79).
Attention toutefois, si le spectacle fait l'objet d'un prix de cession, dans le cadre d'un contrat de cession du droit d'exploitation d'un spectacle, l'assiette de calcul peut être, en pratique, déterminée. L'assiette est, dans ce cas, le prix de cession ; la rémunération proportionnelle reste alors possible (l'auteur ne devant pas supporter les frais d'exploitation, il peut sembler logique, dans ce cas, de lui verser un pourcentage sur le prix de cession incluant les frais d'approche. La SACD retient cette solution. Il s'agit toutefois d'une solution qui n'a pas encore été tranchée par les tribunaux). En cas de spectacles ou lectures gratuites sans prix de cession, la rémunération au forfait est possible dans la mesure où il n'y a aucun prix payé par le public ni aucune recette provenant de la vente ou de l'exploitation ; la base de calcul ne peut donc être déterminée.
b.Caractère excessif des frais d'opérations de calcul et de contrôle
Dans l'hypothèse où les frais des opérations de calcul et de contrôle seraient hors de proportion avec les résultats à atteindre, il est également admis que l'auteur soit rémunéré au forfait. Ainsi, la base de calcul peut être déterminée mais les moyens à mettre en œuvre pour effectuer les calculs de la rémunération et le contrôle seraient excessifs au regard des sommes provenant de l'exploitation ou de la vente de l'œuvre.
c.Impossibilité d'appliquer la règle de la rémunération proportionnelle en fonction de la nature ou des conditions de l'exploitation de l'œuvre.
Cette impossibilité peut être constatée lorsque la contribution de l'auteur ne constitue pas l'un des éléments essentiels de la création intellectuelle, ou lorsque l'utilisation de la contribution de l'auteur ne présente qu'un caractère accessoire par rapport à l'objet exploité.
1.La contribution de l'auteur ne constitue pas l'un des éléments essentiels de la création intellectuelle de l'œuvre
La jurisprudence admet déjà que :
- les œuvres collectives appartiennent à la catégorie pour la rémunération desquelles il est en pratique impossible de déterminer la base de calcul. Pour ces œuvres, la rémunération proportionnelle des participants peut, par conséquent, être écartée (TGI, Paris. 4 janv. 1971. CA Paris, 4è ch. B, 22 décembre 2000. CA, Paris. 9 fév. 2005). Cette solution est surtout justifiée par le fait que les participants à l'œuvre collective ne sont pas réellement considérés comme coauteurs de l'œuvre (Cass, civ 1er. 18 oct. 1994. RIDA 2/1995, p.305) (voir étude "Œuvre créée à plusieurs" ) ;
- la mise à jour d'ouvrage (si elle est considérée comme étant originale) entre également dans ce cas de figure ;
- les arrangeurs musicaux peuvent être rémunérés au forfait.
2.Œuvre présentant un caractère accessoire par rapport à l'objet ou à l'œuvre exploité
Il pourrait notamment en être ainsi pour les créations réalisées par les graphistes destinées au matériel promotionnel d'une pièce de théâtre (affiche, prospectus, etc.). Il a été reconnu par un tribunal que l'auteur d'un dessin destiné à servir d'étiquette à un fromage pouvait être rémunéré forfaitairement (TGI, Annecy. 10 sept. 1998. RIDA 1/1999, p.431).
De même, il a été jugé que l'exploitation des mises en scène de théâtre et des décors pouvait donner lieu à une rémunération forfaitaire, en tant qu'œuvre présentant un caractère accessoire à l'œuvre principale, le texte. En l'occurrence, un tribunal a considéré que le recours au forfait était possible "lorsque l'œuvre ne présente qu'un caractère accessoire par rapport à l'objet exploité, ce qui est le cas pour les décors et la mise en scène" d'un opéra de Bizet, "Carmen", surtout lorsque cet établissement (l'Opéra de Paris) ne présente pas le même spectacle sur une longue période (T.civ. Seine. 2 nov. 1965. JCP 1966. II. 14577).
Attention toutefois, il s'agit d'une décision ancienne. Les mises en scène font le plus souvent l'objet d'une rémunération proportionnelle. D'ailleurs, lorsqu'une mise en scène est déclarée à la SACD, cette dernière perçoit un pourcentage de rémunération distinct de celui de l'auteur de l'œuvre principale qu'elle reversera à l'auteur-metteur en scène directement.
d.Conversion de la rémunération proportionnelle en forfait
"Est également licite la conversion entre les parties, à la demande de l'auteur, des droits provenant des contrats en vigueur en annuités forfaitaires pour des durées à déterminer entre les parties" (art. L131-4, al.3 du Code de la propriété intellectuelle ).
Afin de ne pas pénaliser l'auteur en lui imposant une rémunération proportionnelle systématique, la conversion de la rémunération proportionnelle en annuités forfaitaires est possible, sous réserve du respect des 3 conditions cumulatives suivantes :
- la demande doit être faite par l'auteur ;
- la conversion n'est possible que lorsqu'elle porte sur la rémunération de droits provenant de contrats en cours (cela implique par conséquent que l'auteur ait déjà perçu une rémunération proportionnelle sur ces contrats) ;
- cette conversion doit être limitée dans le temps. L'auteur pourra ainsi à nouveau être rémunéré proportionnellement.
e.Autres hypothèses
1.Edition de librairie
Dans le secteur de l'édition, la rémunération de l'auteur peut faire l'objet d'une rémunération forfaitaire pour la première édition, avec l'accord formellement exprimé de l'auteur, notamment dans les cas suivants (art. L132-6 du Code de la propriété intellectuelle ):
- Anthologies et encyclopédies ;
- Préfaces, annotations, introductions, présentations ;
- Illustrations d'un ouvrage ;
- Editions de luxe à tirage limité ;
- A la demande du traducteur pour les traductions.
La jurisprudence est particulièrement vigilante sur la notion d'accord "formellement exprimé de l'auteur". La règle doit s'entendre comme imposant aux parties l'insertion d' une clause expresse en ce sens dans le contrat d'édition.
2.Contrat d'édition : cessions de droits à ou par une personne ou une entreprise établie à l'étranger
Lorsque le cédant ou le cessionnaire des droits d'auteur est établi à l'étranger, la rémunération forfaitaire de l'auteur est possible (art. L132-6 al.2 du Code de la propriété intellectuelle ).
La portée de cette disposition est limitée aux seules cessions de droit, dans le cadre de contrats d'édition, par une personne ou une entreprise établie à l'étranger.
3.Publications de presse
En ce qui concerne les oeuvres de l'esprit publiées dans les journaux et recueils périodiques de tout ordre et par les agences de presse, la rémunération de l'auteur lié à l'entreprise d'information par un contrat de louage d'ouvrage (c'est-à-dire un contrat d'entreprise, de prestation) ou de services (c'est-à-dire un contrat de travail), peut également être fixée forfaitairement (art. L132-6 al. 3 du Code de la propriété intellectuelle ).
Cette exception ne sera que le prolongement de la règle selon laquelle le forfait est possible lorsque la rémunération proportionnelle est inapplicable selon la nature ou les conditions de l'exploitation, notamment en cas d'œuvre collective (cf d). Cette disposition permet toutefois d'inclure tous les journaux ou recueils périodiques qui, par exception, ne seraient pas des œuvres collectives.
2.Action en révision du forfait
Dans un souci de protection de l'auteur, le législateur a prévu la possibilité de réviser le forfait versé à un auteur lorsque son montant est trop faible (art. L131-5 du Code de la propriété intellectuelle ).
a.Champ d'application de la révision
b.Conditions
La révision des conditions de prix du contrat peut être demandée uniquement "lorsque l'auteur aura subi un préjudice de plus de 7/12è dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l'œuvre".
La lésion sera appréciée en considération de l'ensemble de l'exploitation par le cessionnaire des œuvres de l'auteur qui se prétend lésé (art. L131-5 al.3 du Code de la propriété intellectuelle ).
c.Conséquence d'une action en révision
Si la lésion ou l'insuffisance de prévision est constatée, le contrat n'en est pas pour autant nul. La seule conséquence est le versement d'un supplément de prix à l'auteur lésé pour aboutir à une rémunération forfaitaire juste.
III.Sanction du non-respect des règles de rémunération proportionnelle et forfaitaire
La règle de rémunération proportionnelle et forfaitaire a un caractère d'ordre public. Elle s'impose donc aux parties et entraîne la nullité de la clause de rémunération qui n'est pas conforme. De même, les règles déterminant l'assiette de calcul ont un caractère tout aussi impératif que le principe de la rémunération proportionnelle. Les clauses réduisant l'assiette de rémunération peuvent également être jugées nulles.
a.Nullité de la clause ou du contrat ?
La clause de rémunération étant un élément essentiel du contrat, la nullité d'une telle clause pourrait entraîner la nullité du contrat, la clause de rémunération étant un élément essentiel du contrat (CA Paris, 9 oct. 1995. RIDA Avr. 1996, p.311 ; CA Paris, 25 juin 2003. RIDA janv. 2004, p. 181 et p. 246).
Mais, les juges peuvent également opter pour une nullité partielle et n'annuler que la clause de rémunération, auquel cas le contrat resterait valable (Cass, civ. 11 févr. 1997. Bull. Civ. I, n°54 ; Cass, civ. 9 janv. 1996 : JCP G 1996, II, 22643; CA Paris, 9 févr. 2005. Comm. com. électr. 2005, comm. 99).
b.Nullité relative ou absolue : qui peut invoquer la nullité ?
Les dispositions relatives à la rémunération de l'auteur sont des dispositions impératives d'ordre public. La nullité devrait donc être une nullité absolue et devrait ainsi pouvoir être invoquée par tout tiers au contrat.
Toutefois, toujours dans un souci de protection des intérêts de l'auteur, en cas de nullité de la clause de rémunération, la jurisprudence a décidé que seules les parties au contrat, donc l'auteur le plus souvent, peuvent invoquer la nullité du contrat, et qu'il s'agit donc d'une nullité relative (Cass, civ. 11 fév. 1997 ).
IV.Protection de l'auteur et de sa rémunération
a.Insaisissabilité partielle de la rémunération de l'auteur
Lorsqu'elles ont un caractère alimentaire, les redevances de l'auteur sont insaisissables :
"Sont insaisissables, dans la mesure où elles ont un caractère alimentaire, les sommes dues, en raison de l'exploitation pécuniaire ou de la cession des droits de propriété littéraire ou artistique, à tous auteurs, compositeurs (…) ainsi qu'à leur conjoint survivant (…) ou à leurs enfants mineurs pris en leur qualité d'ayants cause" (art. L333-2 du Code de la propriété intellectuelle ).
b.Garanties de l'auteur créancier
Privilèges. En vue du paiement des redevances et rémunérations qui leur sont dues pour les 3 dernières années à l'occasion de la cession, de l'exploitation ou de l'utilisation de leurs oeuvres, les auteurs, compositeurs (…) bénéficient de privilèges généraux mobiliers et immobiliers des salariés. (art. L131-8 du Code de la propriété intellectuelle , art. 2331 et 2375 du Code civil).
Créanciers privilégiés. Les auteurs et compositeurs sont donc des créanciers privilégiés. La jurisprudence a étendu le privilège de l'auteur à son ou ses cessionnaires.
Créances garanties. Le privilège des auteurs garantit le paiement des redevances dues pour les 3 dernières années, ce qui est notablement plus large que le privilège des salariés, lequel ne garantit que les 6 derniers mois de salaires non payés. En revanche, les auteurs n'ont pas droit au superprivilège des salariés (sauf à bénéficier, parallèlement, de cette qualité). Toutes les redevances dues à l'auteur pour l'utilisation de son oeuvre sont couvertes par le privilège, qu'elles soient d'origine légale ou contractuelle (Cass, civ. 1er mars 1988 ).
Action directe de l'auteur contre le sous-cessionnaire. À défaut de consécration légale, ce principe a néanmoins été admis en jurisprudence (Cass, civ. 16 juill. 1998. Bull. civ. 1998, I, n° 256).