La venue en France d’artistes et de techniciens étrangers pose la question du respect de la réglementation relative aux autorisations de travail et de séjour. Cette étude fait un point sur les autorisations à demander, selon la nationalité du travailleur, son statut et la durée de son déplacement.
I.Salariés ressortissants de l’UE, EEE (plus la Suisse, Andorre, Monaco et San marin)
II.Salariés ressortissants des pays tiers
Par pays tiers, il convient d'entendre tout pays hors UE, EEE, Suisse, Andorre, Monaco et San Marin.
a.Autorisations de travail
Que les salariés soient directement embauchés par un employeur français ou qu’ils soient détachés en France par leur employeur d’origine, une autorisation de travail est obligatoire.
Toutefois, depuis le 1er novembre 2016 l'autorisation de travail n'est plus obligatoire pour les artistes et les techniciens directement rattachés à la production lorsque la durée de leur contrat de travail est inférieure ou égale à 3 mois.
1.Artistes et techniciens rattachés à la production du spectacle dont le contrat de travail est inférieur ou égal à 3 mois
Nouveauté novembre 2016
Le décret 2016-1461 du 28 octobre 2016 a inséré un nouvel article D5221-2-1 ( ) dans le Code du travail. Celui-ci prévoit une dispense d'autorisation de travail dans le secteur du spectacle pour les artistes et les techniciens attachés directement à la production qui viennent exercer une activité salariée inférieure ou égale à 3 mois en France.
Si le technicien n'est pas directement rattaché à la production du spectacle il devra obligatoirement détenir une autorisation de travail.
2.Artistes et techniciens rattachés à la production du spectacle dont le contrat de travail est supérieur à 3 mois / et autres salariés
La dispense d'autorisation de travail fixée par le décret du 28 octobre 2016 ne concerne que les artistes et les techniciens attachés à la production du spectacle dont le contrat de travail est inférieur ou égal à 3 mois. Ainsi, dans le cas de contrats de travail dont la durée est supérieure à 3 mois, l'autorisation de travail reste obligatoire : l'employeur a alors l'interdiction de faire travailler en France un ressortissant d’un pays tiers à l’UE, l'EEE, la Suisse, Andorre, Monaco ou San Marin non muni d’une autorisation de travail en cours de validité.
Toutefois, un ressortissant de pays tiers est dispensé de cette autorisation de travail lorsque les 2 conditions cumulatives suivantes sont réunies (art. R5221-2 du Code du travail ) :
- le ressortissant est déjà salarié d’une entreprise établie dans un pays de l’UE, de l’EEE, ou en Suisse ; il faut donc pouvoir justifier d'un contrat de travail et d’une autorisation de travail délivrée par son employeur. Aucune durée d'ancienneté dans l'emploi n'est exigée ;
- et le ressortissant est détaché en France par cette entreprise dans le cadre d’une prestation de services internationale.
Exemple : un artiste canadien est embauché par un producteur de spectacles en Allemagne. Il détient à ce titre un contrat de travail et une autorisation de travail en Allemagne. Le spectacle est ensuite vendu en France (situation de détachement dans le cadre d’une prestation de services internationale). L’artiste canadien n’aura pas besoin de détenir une autorisation de travail pour effectuer sa prestation artistique en France.
Il est toutefois nécessaire de vérifier au préalable auprès de la Direction régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi (Direccte) que l'autorisation de travail délivrée par le pays concerné permet bien à l'artiste et/ou au technicien d'exercer son activité en France.
Qui doit faire la demande ? En cas de détachement du salarié étranger, c’est à l’employeur étranger de solliciter l’autorisation de travail mais en pratique, la structure française est souvent mandatée par l’entrepreneur étranger et effectue donc les démarches au nom et pour le compte de celui-ci. Les démarches se font soit auprès de la préfecture (service des étrangers) soit auprès de la Direccte (service de la main-d’œuvre étrangère).
En cas d’embauche directe en France, c’est à l’employeur Français de faire la demande.
Si l’entrepreneur français n’est pas mandaté et que le producteur étranger n’effectue pas les démarches, il peut être inquiété d’abord du fait des sanctions prononcées à l’encontre de l’entrepreneur étranger (notamment l’interdiction des représentations), ensuite en raison de la responsabilité solidaire de l’organisateur pour les contrats d’un montant supérieur à 5 000 euros. Il faut savoir par ailleurs que même lorsque le montant du contrat conclu avec des partenaires étrangers est inférieur à 5 000 euros, l’entrepreneur français doit être très vigilant car, s’il arrive un accident, les artistes se retourneront plus spontanément contre l’organisateur français, le travail ayant lieu en France. Il peut être opportun de prévoir une clause de garantie dans le contrat, cela permet à l’entrepreneur français de se retourner contre l’entrepreneur étranger. Il est donc parfois judicieux dans un soucis de simplicité et de sécurité que l’organisateur français gère ces démarches.
Quand faire la demande ? Il est fortement conseillé de transmettre le dossier de demande d’autorisation provisoire de travail 3 mois avant la date de la prestation de travail, au plus tard 1 mois (Circulaire DPM/DMI/2 n°2005-194 du 19 avril 2005).
3.Les principales autorisations de travail
Il existe plusieurs types d’autorisations de travail, notamment :
- les autorisations provisoires de travail (APT) ;
- la carte « Passeport talent » qui est un titre de séjour valant également autorisation de travail. Elle concerne les artistes justifiant notamment d’un contrat de travail supérieur à 3 mois conclu avec une structure dont l'activité principale est la création ou l'exploitation d’œuvres de l'esprit (plus de précisions dans le B infra) ;
- les cartes de séjour travailleur temporaire qui concernent plus spécifiquement les techniciens.
Dans le secteur artistique il existe peu de refus. En cas de refus les principaux motifs sont : la présentation du dossier dans un délai trop restreint ou le non respect des minimas salariaux.
b.Autorisations de séjour
Que les salariés soient directement embauchés par un employeur français ou qu’ils soient détachés en France par leur employeur d’origine (notamment dans le cadre de la cession du spectacle), l’autorisation de séjour est obligatoire sauf pour les salariés de certains pays qui viennent pour un séjour inférieur à 3 mois.
Il est conseillé de faire la demande de visa 2 mois à l’avance.
1.Séjours dont la durée est égale ou inférieure à 3 mois
C’est un visa court séjour, appelé « Visa C », qu’il faut demander auprès du consulat français du pays de résidence ou à défaut auprès de l’ambassade. Le visa obtenu est ensuite valable dans tous les pays de l’espace Schengen.
Quand la durée totale du séjour n’excède pas 90 jours par période de six mois, certaines nationalités sont dispensées de visa : les ressortissants des pays d’Amérique du Nord, de la plupart des pays d’Amérique latine (sauf la Colombie, la Bolivie, l’Equateur et le Pérou), de certains pays d’Asie et d’Océanie. Pour connaître la liste des pays dans lesquels les ressortissants sont dispensés de l’obligation de détenir un visa, il convient de se référer au site du ministère des Affaires étrangères.
2.Séjours supérieurs à 3 mois
L’étranger doit détenir un titre de séjour temporaire. Pour cela, il doit solliciter auprès du consulat français de son pays d’origine un visa de long séjour. Muni de ce visa, il doit, à son arrivée en France, se déclarer auprès de la préfecture de son lieu de résidence et solliciter dans les 3 mois une carte de séjour temporaire.
Pour tout salarié, notamment les techniciens du spectacle, la carte de séjour temporaire doit porter la mention "travailleur temporaire". Elle est valable pour la même durée que l’autorisation provisoire de travail à laquelle elle fait référence.
Pour les artistes interprètes et les auteurs d’œuvres littéraires ou artistiques titulaires d'un contrat de travail d'au moins 3 mois, un nouveau titre de séjour a été créé par la loi du 7 mars 2016. Il s'agit de la carte "Passeport-talent" qui remplace notamment la carte "Profession artistique et culturelle".
Pour pouvoir solliciter ce titre de séjour, l'artiste doit présenter les éléments suivants (art. R313-67 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers) :
- le ou les contrats de travail d'une durée totale cumulée d'au moins 3 mois, sur une période maximale de 12 mois conclus avec une ou plusieurs entreprises ou établissements dont l'activité principale comporte la création ou l'exploitation d'œuvres de l'esprit au sens du code de la propriété intellectuelle (CAA Paris, 28 sept. 2017). Les principaux éléments du contrat sont présentés dans un formulaire conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du travail ;
- tous justificatifs de ressources, issues principalement de son activité, pour la période de séjour envisagée, pour un montant au moins équivalent à 70 % du SMIC pour un emploi à temps plein par mois, permettant de justifier de ses moyens d'existence, à l'exclusion de l'allocation d'assurance des travailleurs involontairement privés d'emploi ;
- les pièces justificatives fixées par l’article 8 de l’arrêté du 28 octobre 2016 (NOR INTV1629674A).
La carte "Passeport talent" vaut également autorisation de travail.