La résolution s’attache ensuite à décrypter les ressorts de la fragilité économique du secteur. Elle l’impute tout d’abord à une raréfaction des finances publiques. Outre le fait que le budget du ministère de la Culture, bien qu’en forte augmentation depuis 2020, reste très inférieur à l’objectif d’1% du budget de l’État, l’instauration de la compétence culturelle partagée a abouti à une montée en puissance des collectivités territoriales dans le financement de la culture, et notamment le spectacle vivant ; au point, comme l’a montré un récent rapport de la Cour des comptes, de reléguer l’État au rang de financeur minoritaire. Or, compte tenu de la baisse des dépenses publiques et de la suppression de certaines recettes fiscales des collectivités territoriales, les structures et activités culturelles présentes sur les territoires seraient potentiellement mises en difficulté. Se basant sur les notes de cadrage budgétaires adressées par les collectivités aux directions des affaires culturelles, le CESE estime que la diminution des dépenses culturelles entamée dès mars 2020 pourrait se prolonger, et atteindre 10% à 20%. « Les collectivités territoriales sont amenées à faire des arbitrages budgétaires où la culture est de plus en plus fréquemment une variable d’ajustement », note-t-il. Ces arbitrages procèdent aussi de choix politiques qui, de l’avis du CESE, contreviennent à la liberté de création et de diffusion, avec pour principal risque celui d’une uniformisation des contenus. Et de citer l’exemple de la Région Auvergne-Rhône-Alpes qui a restreint en 2022 son intervention « pour des raisons de stratégie politicienne ». La résolution s’inquiète, par ailleurs, d’un possible affaiblissement des actions d’éducation artistique et culturelle, imputable conjointement à la diminution du nombre d’artistes programmés, à celle des budgets des collectivités et au déploiement de la part collective du Pass Culture, « qui incite les collectivités à réduire leurs dépenses en faveur de l’éducation artistique et culturelle ». Évoquant un « triple effet ciseau (coupes budgétaires, inflation, augmentation des salaires) », le directeur de la Direction générale de la création artistique (DGCA), Christopher Miles, en appelle à « un choc de confiance, afin de refonder un pacte avec l’ensemble des collectivités territoriales et acteurs locaux, notamment culturels ».
La crise énergétique et la reprise de l’inflation impactent, elles aussi, l’équilibre économique du secteur. Selon une étude réalisée par le syndicat Prodiss, les salles de spectacle auraient subi en 2022 une hausse des coûts de l’énergie de + 173% concernant l’électricité, et de + 147 % s’agissant du gaz. Malgré les mesures de sobriété prises par certains lieux, on peut redouter que le surcoût énergétique entraîne une réduction des marges artistiques, « de l’ordre de 30% en 2023 et 50% en 2024 » pour les établissements subventionnés par l’État. Faute d’être en capacité de produire des spectacles, certains pourraient être contraints de fermer temporairement leurs portes. Dernier signe enfin très inquiétant, les grands labels nationaux s’apprêtent à annoncer des déficits en 2023.