Ouverte mi-avril dans le 13e arrondissement de Paris, RueWATT favorisera une porosité entre pratiques professionnelles et amateures.
Après en avoir nourri le désir dès sa fondation voici près de vingt ans, la Coopérative De Rue De Cirque dispose enfin d’un lieu de fabrique, grâce à la Ville de Paris qui lui a proposé un bâtiment répondant à ses attentes : une hauteur suffisante (7 mètres) afin d’y recevoir des circassiens, et
500 m2 de superficie, de surcroît ouverts sur l’espace public. Situé 18 rue Watt, au cœur du 13e arrondissement, un quartier qu’elle connaît bien pour y avoir mené nombre d’actions avec des acteurs culturels et sociaux, RueWATT abrite les bureaux de la Coopérative, un espace de convivialité équipé d’une cuisine, un petit atelier d’entretien/réparation, un grand espace de stockage et bien entendu deux salles dédiées à la création de quelque 120 m2 chacune. L’une est consacrée à la pratique professionnelle et la seconde à la pratique amateure, dans l’idée de favoriser des échanges, formels ou informels, entre leurs occupants. « Le fait que des artistes qui ne se connaissent pas se rencontrent, et que des amateurs côtoient eux aussi régulièrement des professionnels, constitue l’une des pierres angulaires du projet », souligne le directeur de De Rue De Cirque, Rémy Bovis. Les créateurs œuvrant sur le champ des arts de la rue auront, quant à eux, la possibilité d’investir l’espace public, des places et des jardins alentour.
Occupée toute l’année (hormis du 15 juillet au 15 août), RueWATT organise des résidences selon trois modalités. Tout d’abord, des résidences dites « accompagnées » qui concernent des équipes artistiques soutenues par la Coopérative et appelées à vivre plusieurs temps d’immersion dans le lieu selon un calendrier prédéfini. Deuxième entrée envisageable, les « résidences ouvertes », construites sur la base d’un appel à candidatures. Lancé en janvier 2023, le premier a permis de sélectionner quinze compagnies, et un autre (pour l’année 2024) sera ouvert d’ici l’été. Enfin, les sociétaires de la Coopérative pourront, en toute autonomie et dans des créneaux laissés vacants, profiter de la salle pour répéter ou filer leur spectacle. « Toutes les compagnies seront libres de présenter ou non une forme à l’issue de la résidence, ajoute Marie Chapouillé, co-directrice de De Rue De Cirque. Nous tenons en effet à ce que les artistes profitent aussi de phases de recherche et de laboratoire, rares donc précieuses. »
En s’ancrant fortement sur le territoire – ce qui ne l’empêchera pas de rayonner sur l’ensemble de la capitale, la Région Île-de-France et même au-delà, via des projets européens et la présence en ses murs d’artiste issus de différents pays – le lieu contribuera à renforcer le volet action culturelle et médiation développé depuis plus d’une dizaine d’années par la Coopérative. Des propositions très diverses seront ainsi formulées à l’adresse des habitants du quartier, qu’il s’agisse de publics scolaires, d’adultes, d’enseignants ou de jeunes : ateliers et stages « généralistes » ou centrés (notamment l’été) sur des pratiques spécifiques comme la danse, le hip hop, la découverte d’un agrès ou l’escalade, ou encore préparation d’une création participative, telle celle portée actuellement par la chorégraphe Nathalie Pernette avec une centaine d’amateurs. « Nous sommes en mesure de répondre aux demandes des artistes qui éprouvent le besoin de tester leur création lors de sorties de résidence, ou souhaitent s’impliquer dans des actions auprès des publics », fait valoir Marie Chapouillé. La Coopérative poursuit, par ailleurs, un projet de territoire intitulé « Prendre sa place au féminin », en partenariat avec la Cité des Dames qui accueille des femmes sans domicile fixe. Après avoir pris part à un atelier de danse dans cette structure, ses bénéficiaires fréquentent désormais RueWATT, approfondissant ainsi leur pratique avec des femmes du quartier. Cette action se conclura par une déambulation, accompagnée de musiciens, dans le Parc de Choisy. Un exemple d’initiatives, parmi tant d’autres, qui montre combien ce nouveau lieu ambitionne d’être à la fois une fabrique de création mais aussi de liens à long terme avec les populations.