Porter un projet européen est une opportunité professionnelle enrichissante qu’il faut savoir préparer soigneusement en amont. Voici quelques différents points indispensables à prendre en considération dans la conception d’un projet de cette envergure et les conseils qui vous permettront d’appréhender efficacement son ingénierie.
Les points essentiels à définir en amont
Les propositions sont évaluées sur la base des critères énumérés dans l’appel et il est donc indispensable de tenir en considération ces critères, tant au moment de la conception de sa candidature que pendant l’écriture du projet.
Comme pour tout projet, il est essentiel de rassembler autour de soi une équipe et des partenaires fiables partageant les mêmes valeurs et objectifs. Pour cela, il est conseillé de penser et écrire celles portées par le projet et de s’assurer que chacun des partenaires en ait conscience avant de s’engager. L’origine géographique des pays partenaires est également un des points importants du partenariat. Il est pertinent de veiller à sa diversité géographique, à la cohérence entre les régions et à l’équilibre entre pays européens. Il faut, de plus, regarder si les partenaires non européens font bien partie des pays tiers acceptés dans l’appel d'offres. La cohérence et la complémentarité du savoir-faire des partenaires et de la structure peuvent aussi avoir toute leur importance dans la viabilité du projet. Un partenariat aux compétences complémentaires en sera d’autant plus solide et pertinent. Certains partenaires peuvent avoir des compétences dans l’évaluation de projets de coopérations, d'autres dans la conception de résidences artistiques par exemple. Enfin, la nature des secteurs d’activité du partenariat joue un rôle essentiel dans la qualité de la proposition. Que les partenaires fassent partie d’un même secteur (le théâtre contemporain par exemple) ou s’ils se complètent (arts de la rue, architecture, cirque de création) il faudra le justifier dans la candidature et il est donc important de veiller à la cohérence entre les secteurs d’activités du partenariat et à comment cela réponds aux objectifs portés par le projet.
Gardez à l’esprit que le partenariat doit raconter une histoire. Il est indispensable que vous soyez en capacité de décrire comment, pourquoi et pour qui celui-ci existe.
Plusieurs critères doivent être pris en compte dans la conception des activités d’un projet européen. Il faut en premier lieu cibler les publics et participants afin de pouvoir définir, dans un second temps, l’impact et les bénéfices que les activités peuvent leur apporter. Une activité est pertinente si elle apporte une plus-value au secteur d’activité choisi et à ses acteurs, que cela soit au niveau de l’innovation des pratiques professionnelles et artistiques, du format, des connaissances ou des esthétiques, entre autres. Il faudra aussi prendre en compte les grandes lignes stratégiques du programme de financement ainsi que les objectifs stratégiques de l’Union européenne (UE) relatifs par exemple aux industries culturelles et créatives, au renforcement des capacités des professionnels du secteur culturel et à la diffusion de la création artistique européenne.
La construction du budget varie selon les programmes et il est donc essentiel de prendre compte des spécificités de l’appel choisi. Toutes les opérations liées aux financements de l’UE sont régies par ses règles de gestion financière décrites dans son règlement financier et dans les programmes de financement. Certains autoriseront des coûts fixes, alors que d’autres n'accepteront que les coûts liés aux activités. Le support varie aussi selon les appels mais tous fournissent un cadre spécifique au sein duquel le budget doit impérativement apparaître (plateforme en ligne, document Excel, etc.). Une fois le budget finalisé et envoyé, il ne sera plus possible d’ajouter de nouvelles dépenses. Il faut donc s’assurer d’avoir bien pris en compte l’ensemble des paramètres de votre projet.
Une fois le partenariat défini, il est indispensable d’en penser les méthodes de gouvernance. Ces « règles du jeu » aideront à fédérer les différentes parties prenantes et créer un collectif. En effet, il est difficile de faire fonctionner un projet de coopération de cette envergure sans avoir d’abord défini comment « faire ensemble » et mettre en action les valeurs définies lors du choix du partenariat. La gouvernance implique notamment la mise en place de mécanismes de prises de décisions, le choix de référents par structure, la mise en place éventuelle d’un comité de pilotage ou d’un conseil d’administration et des règles de sortie d’un partenaire en cas de difficulté, de conflit ou rétractation.
Le calendrier du projet se conçoit en équilibre avec le reste des activités de la structure, de ses partenaires et des grands événements phares du ou des secteurs choisis. Il doit être structuré autour d’activités précises, mais rester assez flexible pour parer aux éventuels imprévus. Chaque activité doit être représentée, ainsi que les périodes de mobilités, de créations, de présentation des résultats, par exemple. Il est indispensable de définir un calendrier tenable, afin de garantir la qualité des activités, leur bonnes tenues mais aussi le bien-être des équipes travaillant sur le projet. Chaque programme possède ses propres spécificités concernant la temporalité des projets, et il est donc nécessaire de regarder quelles sont les options proposées.
Les points essentiels à définir pendant le projet
Le dossier de candidature est la base du projet et doit rester un point de repère dans la mise en œuvre des activités. Cependant, il est possible que certaines lignes du projet changent au fil du temps et il faudra alors prendre en considération certains critères pour évoluer sereinement et mener à bien l’ensemble des actions, résultats, ressources proposés.
Des méthodologies de travail doivent être définies rapidement entre partenaires afin de garantir la bonne gestion du projet. Ces méthodologies se conçoivent notamment autour d’outils de communication (mail, dossier partagé, “chat” professionnel), de rendez-vous récurrents type « points d’étapes » et autour de règles de design participatif qui aideront les processus de développement et de conception inhérents au projet. Le partenariat sera éprouvé pendant le projet et il devra rester possible d’adapter ces méthodologies au cas où certains mécanismes ne fonctionnent pas.
Les résultats à présenter pendant et à la fin du projet : les résultats doivent être corrélés aux activités du projet, et pensés au regard des bénéficiaires de l’action (publics, secteurs, parties prenantes) et des objectifs généraux et valeurs définis préalablement. Les formats et contenus peuvent changer en cours de projet, mais ils peuvent difficilement être annulés une fois annoncés dans le dossier de candidature. Les livrables peuvent par exemple prendre la forme de publications, MOOC, créations de sortie de résidence, spectacles, rencontres, etc. Ils devront être valorisés à la fin de chaque activité et plus globalement à la fin du projet. Il est donc important de penser à la valorisation des activités de ses résultats sur le court, moyen et long terme, et définir en amont un plan de communication solide et évolutif.
Les résultats doivent être corrélés aux activités du projet, et pensés au regard des bénéficiaires de l’action (publics, secteurs, parties prenantes) et des objectifs généraux et valeurs définis préalablement. Les formats et contenus peuvent changer en cours de projet, mais ils peuvent difficilement être annulés une fois annoncés dans le dossier de candidature. Les livrables peuvent par exemple prendre la forme de publications, MOOC, créations de sortie de résidence, spectacles, rencontres, etc. Ils devront être valorisés à la fin de chaque activité et plus globalement à la fin du projet. Il est donc important de penser à la valorisation des activités de ses résultats sur le court, moyen et long terme, et définir en amont un plan de communication solide et évolutif.
La communication externe du projet doit se faire tout au long de l’année afin de donner de la visibilité externe au projet, aux partenaires, aux livrables et aux ressources conçues. Il est indispensable de mentionner le programme européen dont la structure est bénéficiaire, ainsi que l’ensemble des parties prenantes. Cela permettra aussi au contenu publié d’être suivi plus largement. La communication peut s’effectuer sur différentes plateformes et réseaux sociaux du choix du porteur du projet et il sera peut-être pertinent de déployer un site internet dédié. La communication et son rayonnement digital est un critère d’évaluation de l’impact que le projet a eu sur des publics dits “indirects”. L’influence sur les différentes plateformes et réseau, le nombre de “clics” et de téléchargements des contenus sont tous de bons outils de mesure et il faut donc garder à l’esprit de prendre en compte ces indicateurs pour le rapport final et de valoriser ainsi le travail de communication effectué et ses retombées.
Les ressources sont corrélées aux activités et peuvent être internes comme externes. Le porteur de projet doit être en mesure de justifier que les activités et dépenses aient bien été mises en place. Pour cela, il est important de générer des ressources internes (liste de participants, compte rendu, galerie photo, vidéos, etc.) permettant de garder une trace de ce qui s’est fait et dit. Ces ressources peuvent être partagées plus largement auprès des communautés engagées, permettant ainsi de nourrir les relations des partenaires avec les publics cibles. Les ressources peuvent aussi compléter les résultats inscrits dans le projet en prenant par exemple la forme d’une publication résumant un séminaire, un spectacle, une résidence, d’un livret avec les profils des artistes présents lors de l’activité ou encore d’un podcast offrant un regard décalé sur une des activités développées.
Les points essentiels à définir une fois le projet terminé
Un projet de cette envergure ne s’arrête pas directement après la date de fin. D’une part parce qu’une tranche budgétaire est souvent versée seulement après l’évaluation du projet, d’autre part parce que, de par son envergure, un projet européen à des répercussions plus importantes qu’il convient d’analyser et visibiliser.
L’impact d’un projet correspond à l’effet produit, à l’action exercée par les activités du projet. Il doit avoir été pensé en amont au travers de différents objectifs, afin de pouvoir concevoir des activités adaptées. Il est aussi indispensable d’avoir pensé les différentes cibles bénéficiaires des actions du projet, celles pour qui les retombées des activités vont être bénéfiques. Il existe différents niveaux d’impact : l’influence du projet sur des groupes cibles (artistes, directeurs de festivals, décideurs politiques par exemple), sur le développement d’un secteur (production de connaissances, de bonnes pratiques par exemple) et sur la visibilité d’un secteur ou d’un groupe de personnes au niveau politique (plaidoyer, légitimation d’une pratique artistique par exemple).
L’ensemble des actions du projet, définies en amont ou pendant le projet, doivent être évaluées à la fin de celui-ci. Cette évaluation garantit généralement le versement de la dernière tranche budgétaire et il est donc indispensable d’en avoir structuré les outils de mesure. L’impact du projet se définit au travers d’éléments variés. Il peut par exemple s’agir d’évaluer le nombre de participants, le nombre de « followers » sur les réseaux sociaux, les réponses à des formulaires d’évaluation ou encore les réponses à une enquête qualitative interne auprès des partenaires. Il peut être pertinent de faire de cette évaluation une infographie, et de valoriser ainsi l’impact final du projet.
Une bonne stratégie de communication et de valorisation du projet devrait lui permettre de continuer de servir aux différentes communautés culturelles même après sa fin. Les résultats et ressources valorisés sont la garantie de sa solidité et de sa pérennité et mettent en valeur les réussites du partenariat. Ils peuvent ainsi être mises à disposition d’un public plus large et servir un intérêt général. Les retombées d’un projet européen peuvent durer longtemps, et il est donc important de penser à des ressources qui pourront rester durablement dans l’écosystème culturel européen et de limiter leur obsolescence.
Une structure ayant bénéficié d’un programme d’aide européen peut parfaitement postuler de nouveau une fois son projet fini. Certains programmes acceptent de financer des projets déjà mis en place, d’autres demanderont de renouveler complètement la proposition. Dans tous les cas, il faudra être en capacité de montrer que la structure a su développer ses compétences de conduite de projets internationaux. Il est conseillé de faire évoluer le projet en prenant en compte les échecs, les difficultés mais aussi les succès rencontrés pendant le premier projet. Il est indispensable de savoir faire évoluer ses pratiques, sa posture professionnelle et son regard sur la coopération internationale et de montrer que les parties prenantes ont évolué.
LES ACCOMPAGNEMENTS ET FORMATIONS DÉDIÉS AUX PORTEURS DE PROJETS
Plusieurs organisations se proposent d’aider les structures souhaitant initier un changement d’échelle à l’international ou postuler à des programmes européens. Certaines formations (gratuites ou payantes) accompagnent ainsi des structures souhaitant solliciter des financements européens dans la conception et l’écriture de leur projet ou aident par exemple à la mise en place et au suivi de projets sélectionnés. D’autres se concentreront plus globalement sur l’internationalisation des activités de la structure et apporteront conseils et bonnes pratiques concernant les tournées, la co-production, la création de nouveaux marchés. N’hésitez pas à regarder le site de votre région, qui sont plusieurs à proposer un accompagnement, notamment via les agences culturelles régionales.