La captation d'un spectacle implique de la part du producteur en charge de l'enregistrement qu'il détienne les autorisations de toutes les personnes (artistes-interprètes, auteurs, producteurs de phonogrammes et vidéogrammes) pouvant détenir des droits (droits d’auteur, droits voisins) et qu'il verse les rémunérations afférentes à l'exploitation de ces droits.
Qui doit obtenir l'autorisation des différents participants au spectacle ?
Plusieurs cas de figure peuvent se présenter :
- Le producteur du spectacle est le producteur de la captation (c'est notamment le cas pour les captations réalisées à titre d'archivage ou promotionnel). C'est donc lui qui recueille les accords des différents titulaires des droits (auteur, artiste interprète, exploitant de la salle de spectacle dans laquelle a lieu la captation, producteur de phonogrammes, etc.). Pour les artistes-interprètes, les autorisations peuvent être données par l'insertion de clauses relatives aux enregistrements dans les contrats de travail.
- Le producteur du spectacle n'est pas le producteur de la captation, mais sollicite toutes les autorisations auprès des titulaires des droits (pour la cession des droits voisins des artistes-interprètes les autorisations peuvent être données par l'insertion de clauses relatives aux enregistrements dans les contrats de travail), puis signe un contrat avec le producteur audiovisuel.
- Le producteur du spectacle n'est pas le producteur de la captation, et c'est le producteur audiovisuel (société de production ou chaîne de télévision ou radio) qui va négocier les autorisations directement auprès des titulaires des droits et les rémunérer. Cela peut être la solution la plus simple pour le producteur du spectacle qui n'a pas à solliciter d'accord ni à gérer le reversement d'éventuelles rémunérations (cachets, redevances de droits voisins, droits d'auteur). Le producteur du spectacle peut négocier une contrepartie financière avec le producteur audiovisuel au titre de son investissement sur la création du spectacle.
Auprès de qui le producteur en charge de la captation doit-il solliciter des autorisations ?
Pour plus d’informations sur la cession des droits d’auteur, consulter la rubrique “Les bases en droit d’auteur”
Quels auteurs ?
Le producteur audiovisuel ou le producteur du spectacle doit conclure avec le ou les auteurs des œuvres représentées dans le spectacle objet de la captation un contrat de cession de droits d’auteur.
Il peut par exemple s'agir :
- de(s) l'auteur(s) du texte joué ;
- du chorégraphe ;
- des auteurs-compositeurs de la musique (jouée en live ou enregistrée) ;
- de l'auteur des vidéos éventuellement utilisées ;
- du metteur en scène en cas de mise en scène protégée par le droit d'auteur ;
- du traducteur ;
- ou de toute autre personne qui pourrait revendiquer la qualité d'auteur sur son œuvre (créateur lumière, costumier, etc.).
A chaque fois qu'une captation est réalisée, il convient de bien identifier en amont l'ensemble des auteurs présents afin d'éviter toute revendication ultérieure ou interdiction d'exploitation de la captation. En effet, l'absence d'autorisation d'un seul des auteurs empêche toute diffusion de l'enregistrement.
Formalisation de l'autorisation
Les contrats de cession de droits d’auteurs conclus avec les auteurs potentiels des œuvres qui composent le spectacle doivent mentionner distinctement chacun des droits cédés.
Les parties doivent préciser dans le contrat le domaine de la cession c'est-à-dire :
- l'étendue des droits cédés ;
- la destination ;
- le territoire d'exploitation ;
- la durée.
Ce formalisme s'impose également aux contrats de cession qui sont conclus sans contrepartie financière pour l'auteur (contrat de cession à titre gratuit).
Un simple accord verbal ou par courrier ne suffit pas, un écrit comportant toutes ces mentions est nécessaire.
La cession dont l'étendue des droits cédés est trop vaste, dont la durée n'est pas précisée, etc. n'est pas valable : toute clause générale et non limitativement énumérée doit être réputée sans effet.
Attention, l'autorisation donnée par un auteur pour l'exploitation de son œuvre sous forme de représentations théâtrales ne vaut pas autorisation de captation. Lorsque le producteur du spectacle autorise le producteur audiovisuel à capter le spectacle, ce dernier doit toujours au préalable vérifier que le producteur du spectacle a bien obtenu l'autorisation de captation de tous les auteurs potentiels. A défaut, la captation constituerait une contrefaçon.
Lorsqu'un producteur audiovisuel (ou le producteur du spectacle lui-même) souhaite capter un spectacle, il doit se faire céder le droit de reproduction de chacun des auteurs concernés pour fixer l’œuvre sur un support (support physique ou numérique). S’il souhaite par la suite diffuser le spectacle à la télévision, par Internet (podcast, streaming, etc) ou par tout autre moyen, il doit en outre se faire céder le droit de représentation pour ces différents moyens de diffusion.
Précisions :
Captation d'œuvres appartenant au répertoire de la SACD (œuvre dramatique, chorégraphie, texte de sketches, cirque, arts de la rue, traduction, mise en scène, musique spécialement créée pour la scène, etc.). Un contrat de cession de droits d’auteur doit être conclu entre l’auteur et le producteur. Néanmoins, si l’auteur le souhaite, la négociation des conditions de cession de droits au producteur peut être confiée à la SACD. Il ne s’agit que d’une possibilité.
Captation d'œuvres appartenant au répertoire de la SACEM. En cas d'exploitation télévisuelle ou radiophonique des œuvres captées appartenant au répertoire SACEM, celle-ci est compétente pour gérer les accords, collecter et reverser les sommes aux auteurs. Il en est de même en cas d'exploitation en DVD ou en CD, en cas d'enregistrement sonore uniquement (SDRM).
Pour plus d’informations sur les droits voisins des artistes interprètes, consulter la rubrique “Les droits de l’artiste interprète”
Qui est artiste-interprète ?
L'artiste-interprète est selon le Code de la propriété intellectuelle "la personne qui représente, chante, récite, déclame, joue ou exécute de toute autre manière une œuvre littéraire ou artistique, un numéro de variétés, de cirque ou de marionnettes". Cette définition n'est pas exhaustive.
La notion d'artiste-interprète doit être distinguée de celle d'artiste du spectacle donnée par l'article L7121-2 du Code du travail qui comprend également les artistes de complément (figurants) et les metteurs en scène. Bien que l'artiste de complément soit considéré comme un artiste du spectacle au sens du droit du travail et est à ce titre présumé salarié, l'article L212-1 du Code de la propriété intellectuelle l'exclut de la définition de l'artiste-interprète. Par conséquent, l'artiste de complément ne dispose d'aucun droit voisin sur sa prestation artistique. De même, le metteur en scène, artiste du spectacle au sens du Code du travail, n'est pas titulaire de droits voisins puisqu'il n'exécute aucune prestation artistique sur scène.
Formalisation de la cession de droits voisins : autorisation écrite des artistes-interprètes
Les artistes-interprètes sont titulaires de droits voisins aux droits d’auteurs sur leur prestation scénique. A ce titre, ils doivent autoriser par écrit la fixation, la reproduction et la communication au public de leur prestation. Contrairement aux autorisations données par les auteurs, le législateur n'a pas expressément subordonné la cession de droits voisins à des mentions obligatoires. Toutefois, par analogie, il est possible de dire que les contrats de cession de droits voisins doivent comporter les mêmes mentions que les contrats de cession de droits d'auteur. C'est d'ailleurs en général dans ce sens que statue la jurisprudence.
Il est donc vivement recommandé de faire signer des autorisations aux artistes-interprètes dans lesquelles doivent figurer les mentions suivantes :
- l'étendue des droits cédés ;
- la destination (un artiste qui cède ses droits pour une exploitation de la captation sur une chaîne télévisée, ne cède pas ses droits pour une exploitation en DVD par exemple. Il convient donc systématiquement de mentionner toutes les exploitations envisagées) ;
- le territoire d'exploitation ;
- la durée de la cession.
Ainsi, la seule conclusion d'un contrat de travail entre un comédien et le producteur de spectacles ne vaut pas autorisation de captation de la prestation artistique : pour que la prestation puisse faire l'objet d'une captation, il est indispensable d'intégrer une clause spécifique dans le contrat de travail (qui doit reprendre les éléments énumérés ci-dessus) ou conclure en parallèle un contrat de cession de droits voisins.
En contrepartie de la cession des droits voisins, l'artiste peut percevoir :
- soit un pourcentage de redevance versé sur l'exploitation de la captation. Il convient de prévoir un pourcentage de rémunération pour chaque type d'exploitation de la captation ;
- soit une somme forfaitaire brute.
Il serait toutefois possible de prévoir que les autorisations de captation concédées sont concédées à titre gracieux, notamment pour les captations à des fins d'archivage ou de promotion ne font l'objet d'aucune rémunération.
Faut-il verser un complément de salaire ou payer un “ double cachet ” aux artistes dont les prestations sont enregistrées (un cachet pour la représentation et un cachet pour la captation) ? Il est difficile de répondre de façon claire et précise à cette question. La difficulté tient à l'imprécision du Code de la propriété intellectuelle et du Code du travail, au double statut de l'artiste (à la fois salarié et titulaire de droits voisins), au faible nombre de décisions de jurisprudence, et à l'imprécision (voire aux contradictions) des conventions collectives.
Dans tous les cas, il conviendra de bien séparer la rémunération versée au titre de la prestation d’artiste du spectacle et celle versée au titre des droits voisins.
N.B. : les droits voisins sont à distinguer des droits à l’image qui correspondent à l’exploitation de l’image d’une personne hors plateau et hors interprétation.
Si le producteur audiovisuel souhaite capter un spectacle comportant une musique enregistrée sur un phonogramme (CD, support numérique, etc) ou une image enregistrée sur un vidéogramme (DVD, etc.), il doit obtenir l’autorisation des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes.
Ces derniers sont en effet à l’origine de la première fixation d’une séquence de sons ou d’images sonorisées ou non. Ils sont protégés, au même titre que les artistes-interprètes, par les droits voisins et peuvent à ce titre négocier les termes de leurs autorisations.
Comme pour les auteurs et les artistes, il existe des sociétés de gestion collective des droits voisins des producteurs de phonogrammes et vidéogrammes (SCPP, SPPF, etc.). Si le producteur est adhérent à l'une de ces sociétés, le producteur de spectacle ou le producteur audiovisuel doivent vérifier auprès des-dites sociétés si elles gèrent ce type d'exploitation.
Lorsque le producteur de la captation n’est pas le producteur du spectacle, une autorisation de filmer par laquelle le second autorise le premier à capter le spectacle peut être négociée.
Le contrat prévoit alors l’utilisation qui pourra être faite de la captation et la contrepartie financière éventuellement demandée par l’entrepreneur de spectacles. Il peut s’agir d’une somme forfaitaire ou d’un pourcentage de recettes lorsque l’enregistrement est destiné à être exploité de façon commerciale. Ces sommes sont négociées de gré à gré ; elles peuvent correspondre à la valorisation des apports de l’entrepreneur de spectacles (costumes, décors, accessoires, etc.).
Exploitation de la captation : droits attachés aux différents coauteurs de la captation
La captation d’une œuvre de spectacle vivant peut être une œuvre de collaboration. La captation est alors la propriété de tous les coauteurs. Ces derniers exercent leur droit d'un commun accord et perçoivent une rémunération en contrepartie de l’utilisation de leur œuvre (ils peuvent également céder leur droit à titre gracieux).
La captation étant une œuvre audiovisuelle, sont présumés avoir la qualité de coauteurs:
- l'auteur du scénario ;
- l'auteur de l'adaptation ;
- l'auteur du texte parlé ;
- l'auteur des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l'œuvre ;
- le réalisateur.
En outre, les auteurs de l'œuvre première sont assimilés aux auteurs de l'œuvre nouvelle, lorsque l'œuvre audiovisuelle est tirée d'une œuvre ou d'un scénario préexistants encore protégés. Ainsi, le ou les auteurs de l'œuvre jouée et captée peuvent être considérés comme coauteurs de l'œuvre audiovisuelle, peu importe que l'auteur de l'œuvre première (le texte, la chorégraphie, la musique, etc.) ait ou non pris part à la réalisation du spectacle vivant ou de la captation.
La durée de la protection des droits patrimoniaux de l'œuvre audiovisuelle (70 ans) démarre l’année civile du décès du dernier des collaborateurs suivants : l'auteur du scénario, l'auteur du texte parlé, l'auteur des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l'œuvre, le réalisateur principal.
La somme globale destinée à rémunérer les différents coauteurs est calculée en fonction de l’exploitation de la captation (exemple : les droits issus de la télédiffusion d’une œuvre appartenant au répertoire de la SACD sont calculés selon des règles spécifiques prenant en compte la durée de la captation, la chaîne de télévision, le nombre et les horaires de diffusion) puis répartis entre les différents auteurs selon des clés de répartition.